Le pogrom de Constantine du 5 août 1934 représente un événement sombre de l'histoire de l'Algérie française. Les sources fournies, principalement le "Bulletin de la Fédération des Sociétés Juives d'Algérie" d'octobre 1934, nous permettent de reconstituer les événements, l'impact sur la communauté juive et les réactions qui ont suivi.
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Le déroulement du pogrom
Le récit d'un témoin oculaire non-juif, publié dans le bulletin, offre une description saisissante de la journée. Dès le matin, une atmosphère tendue règne sur la ville avec la présence de groupes d'indigènes armés de bâtons. Vers 10 heures, l'attaque commence. Des magasins juifs sont pillés et saccagés sous le regard passif des soldats qui affirment "n'avoir pas d'ordres".
L'inaction des autorités est pointée du doigt. Le maire, le préfet et le commissaire central sont absents de la ville. Leurs remplaçants hésitent à prendre des mesures décisives, craignant une escalade de la violence. La décision est prise de laisser faire les pillages pour éviter des pertes humaines, une décision qui s'avèrera fatale.
L'après-midi, la violence s'intensifie. Des incendies ravagent des immeubles juifs et des cris déchirants signalent des massacres dans la rue Abdallah-Bey. Des familles entières sont assassinées, dont la famille Attali dont le récit poignant est rapporté par le témoin.
L'extrait de presse de l'Echo d'Alger du 14 août confirme l'absence de munitions pour les troupes, un ordre donné par l'autorité civile. Cette information cruciale explique en partie l'impuissance des soldats face à la violence des émeutiers.
Réactions et conséquences
Le pogrom suscite une vague d'indignation et de solidarité. Le Consistoire Israélite d'Alger et la Fédération des Sociétés Juives organisent des collectes de fonds, des prières dans les temples et des démarches auprès des autorités pour demander justice. Le sermon du grand rabbin Hanoun appelle au calme et à la confiance en la justice divine, tout en soulignant la nécessité d'aider les victimes.
Une liste détaillée des 25 victimes, dont 24 Juifs, est publiée dans le bulletin, ainsi que les dons reçus pour les soutenir. On note également des témoignages de solidarité de certains habitants de Constantine, chrétiens et musulmans, qui ont risqué leur vie pour sauver des Juifs.
Contexte et analyse
L'article de l'Evolution Nord Africaine du 22 juin 1934, cité dans le bulletin, offre une perspective plus large sur les événements. Il dénonce une agitation anti-française grandissante en Afrique du Nord, alimentée par des excitations extérieures. Ce contexte politique tendu contribue à expliquer la violence du pogrom, les Juifs étant utilisés comme boucs émissaires.
L'analyse des sources soulève plusieurs questions cruciales:
- Le rôle des autorités: L'absence des principaux responsables et l'inaction de leurs remplaçants ont-elles contribué à la gravité du pogrom?
- La passivité de l'armée: Pourquoi les troupes n'ont-elles pas reçu l'ordre d'intervenir plus tôt, malgré la violence des événements?
- Le contexte politique: L'agitation anti-française en Afrique du Nord a-t-elle joué un rôle dans le déclenchement du pogrom?
le pogrom de Constantine représente un épisode tragique qui met en lumière les tensions politiques et sociales de l'Algérie française de l'époque. Les sources nous permettent non seulement de retracer le déroulement des événements, mais aussi de comprendre l'impact sur la communauté juive et les réactions qui ont suivi.

